Nous sommes entrés au Laos depuis la Thaïlande par le poste frontière Chiang Khong – Huay Xay, puis Luang Namtha et Odumxai dans le nord-Laos. On prévoit de traverser le pays du nord au sud, puis de se rendre au Cambodge
Les photos sont sur flickr
Luang Namtha
Nous sommes entrés au Laos par une frontière terrestre avec la Thaïlande proche de la Birmanie, à Chiang Khong. Il y a un petit côté Bob Morane à se dire qu’on se trouve dans ce qui était autrefois le triangle d’or, une région où les trois pays sont proches et où le commerce clandestin de l’opium était une des activités principales. Aujourd’hui le coin est plus calme et propose de somptueux décors de moyenne montagne.
Après avoir dormi à Chiang Rai, bus vers Chiang Khong. La controlleuse nous jette au pied de tuktuk qui nous déposent ensuite au « pont de l’amitié ». On fait tamponner les passeports par les douaniers thaï : nous ne sommes donc plus en thaïlande, mais pas encore au Laos. Un bus nous fait traverser les quelques dizaines de mètres qui ne sont à aucun des deux pays, et nous dépose devant les douaniers Laosiens. Nous sommes au sud de Huay Xai.
Et là d’emblée, changement d’ambiance. Ici, il ne faudra pas être pressé. Les douaniers sont en pause repas, et quand ils auront terminé, faudra pas les brusquer pour franchir les deux guichets. 30$ et une photo nous permettent d’obtenir un visa de 30 jours, ce qui devrait suffire pour traverser le pays du Nord au Sud, un itinéraire assez classique.
Au niveau des noms de ville ça n’est pas simple. Toutes les orthographes semblent exister pour l’endroit où on se trouve. Nous avons croisé Huay Xai, Houay Xai, Huey Xai, Huai Xay, Hue Sai, et pourtant toutes semblent décrire la même chose… Et ce sera un peu pareil pour plusieurs autres villes, pour les noms de plats, etc.
Nous avons raté le dernier bus vers Luang Namtha, mais avec 4 autres voyageurs nous trouvons un van qui nous y amène. Sur la route, on confirme la première impression. On a pas juste changé de pays, on a changé d’univers.
Beaucoup de maisons sont sur pilotis, et en dessous de la maison, on s’abrite à l’ombre et on range plein de choses. A proximité de la frontière, c’est super pauvre, et les maisons tiennent à peine debout. On croise une famille qui lavent un bébé dans une flaque sur le bord de la route ! Il n’y a pas de bus publics, beaucoup marchent le long de la route. On est dans un coin ou vivent des minorités, on croise plusieurs personnes avec des tenues traditionnelles. C’est hyper rural, et un peu partout, il y a des familles de canards et de poussins en liberté, qui se balade, traversent la route….
A Luang Namtha, on pose les affaires et l’hotel et on se balade. C’est une ville-rue longue de plusieurs kilomètres : tout se trouve le long de la grande rue, dans les ruelles il n’y a quasiment rien, et en dehors du centre il n’y a pas grand chose non plus. Très vite on voit un détail amusant. Derrière une fille qui vend des fruits, on voit le « bureau des postes ». En français ! Le pays a été une colonie française de 1893 à 1949, et l’influence française est très présente dans tous les batiments administratifs.
On a pas eu chaud à Luang Namtha. Il fait pourtant bon (selon les critères européens classiques), mais nous nous sommes habitués aux Philippines et en Thaïlande à ce qu’il fasse plus de 30 degrés la journée et 28 degrés la nuit. Ici, la nuit, il faut « seulement » 18-20° (j’en entends déjà au fond hurler « Mais de quoi ils se plaignent ! Ils espèrent quand même pas qu’on pleure pour eux ! »). C’est une température confortable pour dormir si les températures descendent lentement, mais nous avons perdu presque dix degrés en traversant la frontière. Aussi ridicule que ça puisse paraître, on a dormi sous une couverture avec nos sous vêtements thermiques, et c’était pas du luxe ! En fait, ça a été comme ça dans tout le nord du laos, qui est un coin plutôt montagneux. Jusqu’à 10h le matin l’air, pas encore réchauffé, est plutôt frais, et dès la tombée de la nuit on est content de mettre quelques épaisseurs.
Ici, j’ai appris à conduire un scooter. Pas trop le choix. En avoir un est indispensable pour se balader, car les distances sont grandes entre les points d’intérêts, et nous n’avons vu aucune forme de transports publics raisonnablement pratique dans la ville. Ici donc, on me met entre le mains un machin chinois automatique. Il n’est pas trop difficile d’apprendre à s’en servir, et bien moins dangereux de le faire ici que dans une grande ville. Les routes sont larges et le trafic peu dense. Dès qu’on sort de la rue principale, il n’y a plus personne. Vu la diversité des décors, on peut en outre apprendre dans la même journée la conduite sur route, sur chemin, dans la boue, les graviers, et dans les bosses.
A scooter, nous avons donc pu aller voir deux superbes stupa à proximité de la ville, et profiter de chouettes points de vue. Nous nous sommes baladés entre les champs de riz. C’est la période de la récolte, et tout le monde s’active; beaucoup d’enfants transportent des pelles et des bêches sur leurs vélos, pour donner un coup de main. Nous avons traversé plusieurs villages, où le temps semble s’être arrêté il y a des années. Des paraboles rouillées sont devant toutes les maisons, des poules, des canards, des oies et des poulets traversent sans prévenir la route.
Depuis ici, beaucoup vont voir des minorités et faire des rando dans les montagnes. En ce qui concerne le premier pour on aime pas ce genre de choses, et en ce qui concerne le second,de grosses pluies arrivaient, donc on a repris la route.
Luang Namtha est une chouette ville, on a adoré. Beaucoup de gens n’y passent pas, car ils foncent depuis Huay Xai jusqu’à Luang Prabang en prenant des bateaux pour descendre le Mekong, mais le détour par Luang Namtha vaut clairement le coup pour éviter les endroits surpeuplés de voyageurs au centre et au sud du pays. Et ceux qui s’arrêtent à Luang Namtha vont directement à Luang Prabang par la route en une fois. Grave erreur 🙂 ! On peut s’arrêter à Odumxai, c’est ce qu’on a fait et ça valait le coup.
Udomxai
La gare routière de Luang Namtha est à 6km du centre. L’agence qui nous a vendu les billets nous a donné rendez vous à 7h30 pour prendre un tuk tuk pour y aller. A 7h31, le tuktuk part. Plus tard, notre bus, prévu pour 8h30, part à 8h30 pétante. Comparé à la vision très laxiste des horaires qu’on a pu croiser en Thaïlande ou aux Philippines au niveau des transports en commun, ça surprend ! On nous avait vendu une place dans un « bus local », et à ces mots on s’attendait au pire. Finalement, le bus local ressemble plus à un gros van qu’à un bus en décomposition, ce qui est toujours appréciable.
Il y a 120km pour rejoindre Udomxai. 3h de route à travers les montagnes et les paysages verdoyants. De temps en temps, on croise un village, parfois des maisons éparpillées dans les montagnes. Au bout de deux heures de trajet, le chauffeur s’arrête. Pause pipi. Les femmes vont le long d’un chemin d’un côté de la route, les hommes de l’autre, on se contente de s’espacer un peu. Rustique !
On pose nos sacs à Udomxai, après 3 ou 4h de route, pour faire une pause entre Luang Namtha et Luang Prabang, qui représente sinon 10h de trajet. Comme Luang Namtha, Udomxai est une petite ville-rue d’environ 20000 habitants. Impossible de louper les paraboles rouillées, qu’on croise absolument partout.
Aujourd’hui, c’est la fête nationnale. Beaucoup de batiments sont fermés (école, office de tourisme…). Ca ne nous empêche pas de nous balader autour d’une stupa, et dans la ville; il y a beaucoup de guesthouse mais peu d’occidentaux. Les enfants qui jouent dans les rues nous gratifient de joyeux « Sabaideeeee » (« Bonjour ! »), et nous lance de grands sourires. Les magasins sont éclectiques, généralement une simple devanture et plein de produits en vrac. Plein de produits de ferme, pour la culture du riz probablement. Dans un magasin, au milieu de clous qu’on peut acheter au kilo, on trouve un jeu de boules de pétanque ! Les laotiens en sont fan (au point qu’ils ont une équipe qui a fait les championnats du monde : http://www.lepetitjournal.com/bangkok/communaute/actualite/124009-petanque-une-triplette-laos-france-thailande-parmi-lelite-mondiale), et on trouve des boulodromes dans toutes les villes.
Udomxai est aussi à la première grosse ville après la frontière chinoise, une sorte de gros carrefour entre plusieurs grandes routes. C’est pourqui il y a également de nombreux garages (souvent très sommaires) où faire réparer la mécanique fortement sollicitée lors des longs trajets.
La proximité avec la chine amène à des détails surprenants. Une bonne partie de la ville arbore des panneaux écrits à la fois en lao et en chinois. Comme on avait du mal à trouver un endroit où aller manger, nous sommes allés échouer dans un resto chinois. Menu en chinois, personnel chinois, on a commandé en chinois, c’était plutôt amusant. Plus au sud, quand on se rapproche du Vietnam, on trouvera plein de panneaux écrits en vietnamiens. C’est à parfois se demander si le pays a une identité propre.
Au détour d’un temple, on discute avec un étudiant Laotien, qui profite de la journée fériée pour visiter la ville. Son anglais n’est pas terrible et on a un peu du mal à le comprendre, mais il nous explique qu’en parallèle des cours qu’il suit, il donne des cours d’anglais, car de toute façons il n’y a pas assez de gens plus qualifiés pour en donner.
Même s’ils nous ont surpris dans la rigueur des horaires, ici, le rythme est plutôt tranquille et on voit bien la tranquillité de la vie dont on parle souvent quand il est question du Laos. Les gens ne sont ni pressés, ni stressés. On croise pas mal de gens dans des hamacs qui font la sieste. Dans les jardins des maisons, sous les pilotis… même les tuk tuk, à l’arrière du véhicule, ont des hamacs pour piquer un somme quand il n’y a pas de clients.
Le soir, un groupe de Laotien nous invite à participer à la fête nationale. C’est un évènement qu’on fête en famille et entre amis, pour célébrer la victoire de la révolution de 1975 (Cette année, c’était donc les 40 ans). On se retrouve à une table, notre hôte est avec quelques amis et membres de la famille. Détail amusant, c’est une petite ville, nous sommes presque à la campagne. Sous notre table se baladent des poules et une portée de poussins. Normal. Ils nous offrent à boire et nous tendent des canettes de Beerlao, presque la boisson nationale.
Lina, notre compagnon du jour, ne veut pas boire de bière. Sans qu’on ne leur demande rien, un de nos hôtes s’empresse de se lever et d’aller acheter deux bouteilles de coca dans le magasin d’à côté.
Le rythme de l’apéro est surprenant : chez nous, on trinque une bonne fois pour toute quand tout le monde est servi, puis chacun boit à son rythme. Ici (et on a revu ce genre de choses ailleurs au Laos), on trinque sans raison apparente avec tout le monde et toutes les quelques minutes, ce qui force à tenir un rythme soutenu (ou dans notre cas, quand on a compris le truc, à faire semblant de boire). Notre hôte nous explique fièrement qu’il boit tous les soirs : « je travaille dur donc je mérite de boire beaucoup ». Plus tard dans la soirée, nous avons été au première loge pour les voir profiter de la « boite de nuit » improvisée : la maison juste à côté de notre chambre a mis de grosses baffles et de la musique à fond, les gens ont fait du karaoké et dansé une bonne partie de la soirée. Et malgré les boules quiès, on a eu bien du mal à s’endormir.
Bref, un autre chouette arrêt dans une ville calme. Sauf la nuit de la fête nationale, mais ça, c’est à la fois le charme et le désagrément du voyage 🙂